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A. Laurens - 1812
"Annuaire statistique du département du Doubs", Besançon, p.35-37

Laurens (1812)
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Commentaire :

A. Laurens était chef de division à la Préfecture du Doubs.

Extrait :

La grotte d'Osselle sur-tout, est un des phénomènes les plus curieux que la nature puisse offrir dans l'immense variété de ses productions. A dix-sept kilomètres de Besançon, sur le territoire du village d'Osselle, et près des rives du Doubs, dans le flanc d'une colline peu élevée, on trouve une ouverture basse et étroite dont le sol humide et glissant, et sur-tout la pente vers l'intérieur donnent peu de sécurité aux curieux qui veulent tenter de s'y introduire. C'est dans cette ouverture qu'il faut s'abandonner quelques instans pour jouir ensuite d'un spectacle digne d'attention. L'obscurité complète qui règne dans cette caverne, les détours sinueux qu'elle présente dans sa vaste étendue, et l'air peu propre à la combustion et à la respiration qu'elle renferme, exigent des précautions; il convient de se munir de plusieurs flambeaux, et il est nécessaire de se faire accompagner d'un guide pour la parcourir avec sûreté. Après avoir marché quelques secondes dans l'ouverture qui fait entrée, on s'apperçoit que les voûtes s'élèvent; les sons de la voix répercutés au loin, font déjà pressentir à l'observateur qu'une vaste étendue est ouverte devant ses pas. On arrive enfin dans une salle spacieuse, retraite habituelle pendant le jour d'une quantité considérable de chauve-souris. Ces animaux en tapissent la voûte et font entendre de légers sifflemens qui annoncent l'inquiétude que leur cause la visite inattendue qu'ils reçoivent; on ne les trouble point, crainte que leur mouvement agite ou éteigne les flambeaux. On passe de cette salle, qui n'a de curieux que son étendue, dans une autre qui la suit immédiatement, et dans plusieurs autres adjacentes; c'est là que se développent et brillent de la lumière réfléchie des flambeaux, toutes les richesse de la pétrification la plus variée. D'innombrables stalagmites et stalactites y ont produit une foule d'objets à la fois grotesques et imposans. Toutes les configurations que l'imagination la plus active pourroit concevoir y sont produites et se présentent aux yeux de toutes parts. D'énormes stalagmites arrondies en colonnes, semblent supporter les voûtes toutes brillantes de cristaux. Ici on voit des monumens réguliers d'architecture moderne; là, c'est le goût gothique qui a produit de longues colonnes délicatement ornées et qui offrent ce que ce genre a de plus recherché.
Après avoir parcouru, non sans quelques difficultés, plusieurs de ces salles décorées de portiques, de figures d'hommes, d'animaux de toute espèce, sur une profondeur de 700 pas géométriques, la voûte s'abaisse et laisse voir encore une ouverture au delà, mais le guide s'arrête à ce point, et conseille aux curieux de revenir sur leurs pas. On repasse dans les mêmes sentiers, et après avoir provoqué des échos singuliers, on regagne l'ouverture en éprouvant un certain plaisir à revoir la lumière.
En examinant la colline de l'extérieur, on remarque que les terres qui couvrent la grotte sont graveleuses et incultes; elles produisent une herbe courte et rare, et servent de pacage pour les moutons de la contrée. Il paroît que la nature de ce terrain qui ouvre un libre passage aux eaux pluviales, favorise les infiltrations lapidifiantes qui multiplient sans cesse les phénomènes intérieurs de la grotte.

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