A. Laurens
- 1839
Commentaire
:
A. Laurens
était chef de division à la Préfecture
du Doubs. Partiellement
une reprise du texte paru dans l'annuaire de 1836
Extrait
: III Gaz
azote 79
parties. Gaz
oxygène
17
id. Gaz
acide carbonique 4
id. Egalent
Cette
analyse faite avec exactitude démontre que l'air des
grottes est composé des éléments
nécessaires à la respiration et à la
combustion. Il est démontré d'ailleurs que
l'air s'y renouvelle par des courants qui s'introduisent
probablement avec les eaux du ruisseau de la
Froidière, qui les traverse. La
température est moyenne dans toute leur longueur, on
en supporte facilement la fraîcheur; mais l'air y est
constamment si humide, que les vêtements des visiteurs
en sont mouillés.
"Annuaire
statistique et historique du département du
Doubs", Besançon, p.206-211
Page
de titre
Grottes et cavernes
Il n'est guère de contrées qui offrent autant
de grottes, de cavernes et de cavités souterraines,
que les départements formés de la subdivision
du Comté de Bourgogne. On en connaît beaucoup
sans doute, mais il est certain qu'il en existe un plus
grand nombre encore, qui, ne communiquant point avec les
flancs et les revers des montagnes, resteront
ignorées jusqu'à ce qu'une circonstance
imprévue en procure la découverte. Parmi
celles que nous avons parcourues, les unes nous ont paru
produites par les courants d'eaux qui, après
s'être creusé ces canaux naturels, ont
trouvé des issues souterraines et ont laissé
à sec leurs anciens lits; d'autres sont le
résultat d'éboulements qui ont eu lieu par
l'affaissement de couches inférieures ou par des
bouleversements que le sol aurait éprouvés
lors de sa dernière formation.
Parmi les grottes multipliées qui sont connues dans
l'ancienne Franche-Comté, les grottes d'Osselle sont
les plus célèbres. Leurs sombres
cavités, leur immense profondeur, les ossements
d'ours renfermés dans son sol et les
précipices que les visiteurs rencontrent
çà et là, sont l'objet des rapports
plus ou moins exagérés de ceux qui ont
pénétré dans cette suite de cavernes
ténébreuses.
Dans un vallon fertile, que le Doubs divise en deux parties
inégales, et qu'embellit encore une dérivation
du canal du Rhône au Rhin, on voit, en arrivant par
Byans, d'un côté le village d'Osselle, et
à gauche, sur une colline, les premières
maisons de la commune de Roset-Fluans : le Doubs, qui est en
ce lieu d'une largeur considérable, serpente avec
majesté dans une plaine peu élevée
au-dessus de son niveau, vient se diviser en deux branches
pour entourer la petite île du moulin de la
Froidière, couverte d'arbres et d'arbustes d'un effet
charmant, et donne à ce vallon un aspect enchanteur.
C'est sur la gauche du fleuve, vis-à-vis la commune
d'Osselles, que se trouve la haute colline qui renferme les
grottes profondes, portant son nom, quoique situées
sur le territoire de Roset-Fluans.
La seule entrée connue aujourd'hui (1) s'ouvre
dans une fissure de rochers sur le revers du coteau qui
s'abaisse vers le Doubs; cette entrée est basse et
étroite, mais après avoir passé dans
cette espèce de corridor en pente, on entre dans une
longue suite de cavités souterraines, tantôt
resserrées, quelquefois spacieuses, dont les
voûtes, inégalement élevées, sont
presque toujours, ainsi que les parois, garnies de
stalactites plus ou moins brillantes, présentant les
configurations fantastiques les plus variées. Des
dépôts sablonneux, des débris de
coquillages d'eau douce, annoncent presque partout le
séjour qu'y ont fait les eaux, et cette observation
générale rejette bien loin le temps où
ces cavités ont pu servir de retraite aux animaux des
forêts qui couvraient la contrée primitivement.
Les sinuosités et la direction de cette suite de
grottes sont connues par les opérations
géométriques que nous avons fait
exécuter en 1826 dans toute leur longueur (V. le
plan joint à l'Annuaire de 1833).
(1) On
présume qu'il y en avait d'autres qui ont
été fermées par des
éboulements.
Elles s'étendent du N.-E. au S.-O. sur une ligne
sinueuse non interrompue, de près de neuf cents
mètres, d'abord sur le territoire de
Château-le-Bois, puis sous celui de Roset, et se
terminent sous la forêt communale de
Villars-Saint-Georges. Aux deux tiers de la profondeur des
grottes, on voit un ruisseau qui les traverse, et qui, avant
qu'un intendant de la province y eût fait construire
un pont, était un obstacle insurmontable pour se
porter au-delà. Les fouilles faites en 1826 pour la
recherche d'ossements fossiles, ont démontré
que ce ruisseau n'avait pas été
traversé par les animaux auxquels les grottes ont
servi de retraite : l'existence de ces animaux
démontre qu'ils avaient, pour pénétrer
dans ces cavernes, des ouvertures qui ont été
fermées par des éboulements, car il est
évident que l'entrée unique qui existe
aujourd'hui n'a jamais servi d'issue à des animaux de
la taille et de la force des ours (ursus spelaeus),
qui, d'après les ossements recueillis, devaient avoir
la taille de nos chevaux ordinaires. (Voyez l'Annuaire
de 1828, où se trouvent tous les détails
de la découverte de ces ossements, dont quelques-uns
contiennent encore de la gélatine.) En 1827, le
célèbre Cuvier a fait un rapport à
l'Académie des sciences sur cet objet ; nous en avons
donné un extrait dans l'Annuaire de 1837. (V. p.213.)
Dans la 2e salle qui suit l'entrée, on trouve
déjà des ossements d'ours en fouillant le sol
; mais ils sont agglomérés avec de gros
débris de roches et de stalactites tombées des
voûtes, dans une terre noire compacte, recouverte de
stalagmites. Ces ossements, peu nombreux, sont presque tous
brisés.
Après avoir passé sous un rocher à
travers un banc d'argile ouvert par la main de l'homme, on
arrive sur des portions de rochers provenant
évidemment de la chute d'une partie
considérable de la voûte, laquelle, dans cet
endroit, est à une hauteur considérable. On ne
traverse plus que des débris recouverts de
stalagmites, jusqu'aux longues et vastes cavernes que l'on
désigne sous le nom de grande salle. Les parois et
les voûtes de cette enceinte sont revêtues de
stalactites, dont les formes variées
représentent une foule d'objets, successivement
majestueux, grotesques, gigantesques ou très-minimes.
Le sol se compose d'argiles qui reposent sur un filon de
mine de fer en grains, de quelques pouces
d'épaisseur; ce filon est remplacé à
quelque distance par une couche de terre noire
très-ténue et douce au toucher; l'argile qui
la recouvre en est toujours séparée par une
plaque de stalagmite très-compacte; c'est sous cette
couche que l'on a trouvé et que l'on trouve encore le
plus d'ossements, souvent incrustés dans le calcaire
qui en représente le moule. Si l'on fouille le sol,
on rencontrera constamment, sur une longueur de près
de 200 mètres, des ossements de l'ours des cavernes,
espèce colossale qui n'existe plus. Les bancs
d'argile qui recouvrent le gisement des os fossiles, varient
de 30 40 centimètres d'épaisseur ; mais quelle
que soit cette épaisseur, les ossements y sont
également très-nombreux. Cette argile,
résultat des dépôts successifs
apportés par les eaux, est disposée par
couches très-minces de couleurs diverses, qui
démontrent la succession des dépôts, et
par conséquent que les excavations des grottes ont
été souvent remplies d'eau.
Les ossements se trouvent en plus grand nombre encore dans
un contour à droite, près du pont, au fond
d'un amas de sable humide que l'on peut gravir
commodément pour arriver à une grotte
particulière formant une galerie supérieure
parallèle à la salle dont nous venons de
parler; quatre autres grottes plus étroites
s'embranchent sur celle-ci. Toutes sont garnies d'une
immense quantité de stalactites fraîches et
brillantes, de formes très-variées. Les
voûtes en sont basses, on ne peut les parcourir qu'en
se courbant. Les stalagmites qui en forment le sol sont
d'une grande épaisseur; on en a levé des
tables de 11 à 12 centimètres. On a
trouvé sous ces stalagmites des ossements d'ours,
mais d'une espèce moins grande, quoique toujours
caractérisée par une tête à front
bombé. C'est dans la pente sablonneuse, près
du pont, qui conduit à cette galerie, restée
inconnue jusqu'en 1826, que l'on a trouvé les plus
beaux ossements de la grande espèce; on y a recueilli
des têtes d'une belle conservation, dont l'une
était déjà à moitié
transformée en fer (2).
(2) Ce
morceau curieux est au cabinet d'histoire naturelle de la
ville
Sur le point de vue géologique, les grottes
d'Osselle, qui semblent avoir servi de lit à un cours
d'eau qui se jetait dans le Doubs, présente un
phénomène curieux; on voit, à 60
mètres de la grande salle, en marchant vers le pont,
un passage de 75 mètres de long, dont les
voûtes, arrondies uniformément comme le
seraient celles d'un long corridor de cloître,
semblent être le résultat d'un travail d'art.
Ces voûtes sont élevées de 7 8 pieds
sous le cintre; le sol, d'un niveau égal d'un bout
à l'autre, est formé d'une terre
légère; ce qu'il y a de remarquable dans ce
lieu, c'est que nulle part on ne voit de stalactites. On
distingue sur les parois, dans les parties
inférieures, des érosions en ligne droite qui
prouvent qu'un cours d'eau a coulé dans ce canal
pendant un long espace de temps. Ce phénomène
démontre que, dans toute la longueur de ce passage,
les voûtes n'ont aucune fissure communiquant avec le
sol des terrains supérieurs qui recouvrent les
grottes à l'extérieur; car on sait que les
concrétions des cavités souterraines sont le
résultat de l'infiltration des eaux des terrains
supérieurs.
Au delà du pont, on trouve encore de belles salles
bien ornées, et on arrive à un passage
étroit dont la voûte est si
hérissée de stalactites, qu'il faut se tenir
courbé pour le traverser sans se blesser; on arrive
au-delà dans ce qu'on appelle la dernière
salle, parce que l'on n'a pu encore aller au-delà.
Celle-ci est ornée de stalactites bizarres; on en
voit de fort belles tombant en draperies
élégamment plissées. À gauche,
au niveau du sol, on voit un précipice
très-profond dans lequel il existe de l'eau.
Les grottes d'Osselle ne peuvent être visitées
avec sécurité que lorsque s'étant
réuni à plusieurs personnes ayant chacune une
chandelle à la main, on se fait conduire par le
gardien. On respire librement dans ces sombres demeures; les
lumières ne s'y éteignent que lorsqu'elles
sont atteintes par les gouttes d'eau qui tombent des
voûtes. Cent parties de l'air recueilli à
quelques pouces du sol ont donné à l'analyse
chimique , savoir :