Une exploration spéléologique
qui finit mal...
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Compte tenu du métrage fait et du soin méticuleux apporté au cheminement, nous devrions être arrivés depuis longtemps, aussi R. stoppe la caravane et part seul en reconnaissance. La galerie se rétrécit, descend de plus en plus fort en laminoir à 60°. Nous sommes donc égarés, car nous avions cheminé à l'horizontale pour venir.

Après un bref conciliabule, nous reculons en s'arrêtant cette fois à chaque croisée pendant que R. explore l'embranchement à tâton. Malgré l'éloignement, nous l'entendons heurter les obstacles et jurer comme s'il était à côté de nous. Il siffle désespérément son chien. Lors des profonds silences que nous laisse l'arrêt du martèlement de nos souliers dans ces boyaux sonores comme des réservoirs vides, nous tendons l'oreille dans l'écrasant et hallucinant silence souterrain, mais aucun son ne parvient, aucune lumière n'est en vue.

Cette fois, le doute n'est même plus permis, nous sommes... perdus... !! Reverrons-nous une fois le jour. L. parle de sa femme et de ses gosses. D. du beau soleil qu'il fait dehors.

R. interrompt ce lamentable dialogue par un violent juron, fait lever tout le monde et la lamentable caravane reprend son cheminement vermiculaire vers son destin. Les reconnaissances latérales continuent pour aboutir toutes à des passages dont nous n'avons nul souvenir. R. commence aussi à perdre courage et siffle presque sans arrêt.

Lors d'une de ces interminables stations à une croisée, D. semble entendre remuer faiblement devant nous. Comme nous n'entendons absolument rien, nous mettons cela sur le compte de l'épuisement de notre collègue et continuons.

A la station suivante, D. recommence à entendre des bruits. Nous lui remontons le moral de notre mieux, lui faisons mille promesses.

Couché à plat ventre lors d'une halte, R. entend à son tour des bruits. Retenant nos respirations, nous écoutons aussi. Effectivement, par moments, des pierres semblent remuer loin devant nous. G. fait remarquer que dans les états d'extrême fatigue les cas d'hallucinations collectives sont fréquents.

R. voulant en avoir le coeur net part en avant dans la direction du bruit. Celui-ci se fait plus distinct mais semble maintenant venir de derrière. Chacun de penser aussitôt que nos pauvres têtes meurtries et fatiguées commencent à chavirer. R. dans un dernier sursaut d'énergie pousse un long sifflement auquel répond instantanément un aboiement très lointain et très étouffé.

Le chien vient donc à nous avec sa lumière, nous sommes près de la salle et sauvés. Nous forçons l'avance ; la voix du chien se fait de plus en plus nette et nous entendons même sa respiration par un effet d'amplification accoustique formidable. Nous avons beau fixer l'endroit d'où vient le son, ainsi que l'endroit opposé, mais aucune lumière n'est visible. Pourtant nous nous rapprochons rapidement. Son maître lui parle, c'est incroyable, nous l'entendons comme à 5 mètres.

Chien

Tout à coup le voilà sur nous, mais sans lumière, et nous qui croyions à une amplification de sons éloignés. Cette arrivée inopinée provoque un débordement de joie indescriptible dans le groupe. Du côté quadrupède la joie n'est pas moins intense. Que de coups de langue, de queue, de jappements et de cabrioles.

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