|
|
Le porche de
la grotte est un maelstrom à la gueule
bigarrée. Plus loin, dans la caverne, un tourbillon
hélicoïdal a figé son empreinte dans la
pierre. Là où jadis rugissaient les eaux,
règnent à présent calme et silence. Et
toutes les couleurs sont demeurées
prisonnières des ténèbres absolues de
la grotte. Elles y attendent leur élargissement.
Jean Truel est un peintre dont le tempérament
s'apparente à la brise annonciatrice des orages. Que
ce soit dans une grotte, sur le papier, la toile ou
l'aluminium, à la surface même de la terre, il
soulève la tempête. Dans les larges touches de
ses peintures, dans leurs couleurs primaires, on peut
percevoir l'énergie, la vitesse, l'impatience, voire
la violence qui ont présidé à leur
création.
La caverne est un lieu froid, silencieux, totalement obscur.
C'est un néant susceptible d'engendrer n'importe
quoi. Dans ses tableaux, Jean Truel nous en fait
découvrir une réalité rarement
perçue, s'évertuant à distinguer les
couleurs des ténèbres, à rendre
permanent cet aperçu d'éternité latente
que nous fournit l'obscurité de la grotte.
Le maelstrom nous précipite dans la spirale qui
étend ses bras jusqu'au point de fuite. Les oeuvres
de Truel nous entraînent dans le monde des couleurs,
dans les abîmes tourmentés de l'espace
intérieur. Lumière née des
ténèbres, formes nées du vide, ses
images sont primordiales, élémentaires,
décisives. Elles existent dès leur point
d'origine.
Jean Truel pénètre dans les profondeurs
souterraines de son être et trouve dans
l'obscurité la lumière qui justifie sa raison
d'être. Réjouissons-nous qu'il sache si bien
illuminer sa vision et nous en faire profiter.
Richard A.
Watson
Ecrivain et professeur de philosophie
Université de Washington - St-Louis, Missouri,
USA
|