Poèmes de Jean Colin
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 Liberté n'est pas licence... !

Il est des spéléos qui aiment la science,
D'autres, l'effort physique et l'assaut concerté,
Tous prisent, avant tout, leur chère liberté
Sans pour cela, pourtant, offenser la décence.

Mais certains plaisantins, avec inconscience,
Voudraient-ils inciter à l'immoralité ?
On assure qu'ils font, avec vivacité,
Grief aux spéléos d'ignorer la licence!

Prudes, rassurez vous! Il s'agit seulement
D'instaurer sous la terre, et très moralement,
L'Age de la Vignette et de la T.V.A.

Pour vivre avec son temps, nul n'y doit échapper.
Suivons ces novateurs, et bientôt, il faudra
Pour faire nos besoins, produire un C.A.P.!

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L'or des Cavernes

- "Non, je ne comprends pas que vous puissiez vous plaire
Au fond d'un gouffre obscur! Qu'avez-vous à cacher?
Il faut bien être fou! Que peut-on dénicher
Dans un endroit aussi sale? Un trésor à extraire?"

- Si nous n'avons jamais trouvé de numéraire,
Ni d'or ou de diamants que l'on puisse ensacher,
C'est pourtant un trésor que nous allons chercher,
Et nous mentirions en disant le contraire,

Mais un trésor, Ami, qui n'est pas monnayable.
A l'ère des robots et du temps minuté,
Nous retrouvons, sous terre, la sérénité.

Nous pouvons, sans contrainte, aller à l'aventure,
En des lieux sans jalons, sans panneaux, sans clôture.
Croyez-nous, de nos jours, c'est inappréciable!

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Découverte

 Au fond du puits, pas de continuation!
Il longe les parois, il éclaire, il observe,
Et, tout en prospectant, assez vite, il s'énerve
En retrouvant partout la même obstruction

D'ignobles détritus. Une sélection
De ressorts, de sommiers, de boîtes de conserve...
Sont-ce là les trésors que le gouffre réserve
A des animaux en putréfaction... ?

Enfin, sous un auvent, il voit, toutes petites,
Dans son jet lumineux, briller des stalactites
En un buisson nacré, scintillant de diamants.

L'homme s'est approché, joyeux, les yeux brillants,
Heureux de découvrir ce sceau du Créateur,
Parmi ce ramassis d'écoeurante laideur.

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Appel

Le printemps resplendit. Partout, l'herbe repousse
Il fait beau, la terre a son aspect radieux.
Sur le sol éveillé, le peuple industrieux
Des insectes revient rôder parmi la mousse.

Un homme grimpe au flanc d'une falaise rousse.
Il a de lourds souliers, un sac volumineux.
Il s'arrête devant un sombre trou rocheux,
Et jette son fardeau, d'une brusque secousse.

Il fait chaud, le beau temps invite à la paresse.
Toute création chante avec allégresse
La clarté du ciel bleu, le soleil et le jour.

Mais la nuit a, sans doute, un attrait bien puissant:
Tête en avant, couché sur le rocher luisant,
L'homme s'est introduit au souterrain séjour.

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Chauves souris

 Le vulgaire vous tient pour animaux immondes
Envers lesquels on peut user de cruauté,
Chauves souris timides, au minois fûté,
A la robe de moire, aux prunelles bien rondes.

Hôtes des vieux clochers ou des grottes profondes,
Rhinolophe rustique, au gros nez épaté,
Léger minioptère au pelage bleuté,
Sérotine ou murin, espèces peu fécondes,

Barbastelle, oreillard... toutes, nous vous aimons.
Pourquoi ne pas le dire: nous vous jalousons,
Quand, dans l'air calme et noir, en un doux frôlement,

Votre aile de velours passe invisiblement,
Et vous porte si vite, en des coins de cavernes
Où ne luiront, peut-être, jamais, nos lanternes.

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Stalagmites

Tantôt gnômes trapus, aux gros crânes lunaires,
Et tantôt minarets scintillants de cristaux,
Surgissant de la nuit, au détour des boyaux,
Vous dressez fièrement vos silhouettes claires.

Solidement plantés dans les décors calcaires,
Que la goutte qui tombe habille de joyaux,
Figés au garde à vous, vos longs fûts verticaux
Paraissent les gardiens des voûtes millénaires.

Impassibles témoins d'un âge révolu,
Vous avez vu les temps où l'homme a résolu
De demander asile au sous-sol froid et sombre.

Dans un lointain futur, quand des siècles sans nombre
Sur vous auront passé, comme passe un moment,
Vous veillerez encor, silencieusement.

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