BAUME de REVIGNY
39 - Revigny
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La grotte-refuge

 

 

 

 

 

La Guerre de Dix Ans (1635-1644)

 

 

 

Depuis le milieu du XVIème siècle, la Franche-Comté est sous la domination espagnole. Après une première tentative d'annexion en 1595 par Henri IV, la province est à nouveau attaquée en 1636 par les armées françaises de Louis XIII et Richelieu. C'est le début de la Guerre de Dix Ans (1635-1644), qui correspond à des années terribles de ravages, massacres, peste, famine et exode.

 

Dans le secteur de Lons-le-Saunier et Revigny, ce sont les troupes du duc de Longueville (Henry d'Orléans) qui envahissent la région, au printemps 1637. Pour fuir l'avancée française, surtout après la prise et l'incendie de Lons-le-Saunier (25 juin 1637), de nombreux habitants partent se dissimuler hors des villes, parfois dans des grottes.

 

 

 

Un refuge souterrain pendant 8 ans (1637-1644)

 

 

 

C'est ainsi que la Baume de Revigny voit affluer des réfugiés venus de Revigny, Conliège, Saint-Maur, Poids-de-Fiole, Publy, Vincelles, Macornay, Courbouzon, Vernantois et Courlaoux, puis de Lons-le-Saunier.
Ces dizaines (centaines ?) de personnes ne trouvent sans doute pas toutes place dans la grottes, et un certain nombre vit probablement dans des cabanes alentours. Mais une certitude existe: de nombreuses personnes ont vécu là, dans une caverne, pendant de nombreuses années.
On pourrait craindre que cette affirmation soit sortie de l'imaginaire populaire, comme c'est parfois le cas à propos des grottes-refuges. Il n'en est rien : on dispose en effet d'archives irréfutables, grâce à la présence sur place  du curé de St-Maur et Revigny, Simon Conduit, qui consigna les évènements dans des courriers, sur les registres paroissiaux, et même sur les pages de son missel !

 

 

 

Des archives précieuses

 

 

 

Ainsi, une enquête de 1645 cite Jean Jacquet, de Courlaoux "estant [le7 décembre 1637] au baulmes de Revigny comme refugié dois environ trois semaines auparavant a cause de l'armée françoise ayant pris le chasteau de Courlaou...".
Ou encore, le registre paroissial de St-Maur parle le 14 janvier 1642 de Pierrette Bidot, "demeurant depuis quatre ans dans les baumes de Revigny".

 

Le registre paroissial de Revigny recense des baptêmes administrés entre le 2 juillet 1638 et le 7 décembre 1644, dans la grotte, par Simon Conduit: "Registrum infantium qui baptismi sacramentum apud rupes et balmas Revignienses bellorum injuria (...)".
On trouve aussi mention des mariages, célébrés à partir du 12 janvier 1638: "Registrum eorum qui matrimonii sacramentum apud rupes et balmas Revignienses bellorum injuria (...)". On apprend ainsi que le curé a uni 4 couples le 12 janvier 1638, et un cinquième le lendemain !

 

Autre archive précieuse, le testament de Humbert Bidot, recueilli par le curé -la seule personne instruite- le 7 décembre 1637, et surtout sa suite judiciaire, la soeur du défunt ayant contesté le document après la guerre. Les déposition des témoins sont riches de renseignements sur la vie quotidienne dans la grotte. On en trouvera des extraits dans l'article de E. Monot paru dans Le Vieux Lons en 1912.

 

 

 

La vie souterraine

 

 

 

EncochesLes réfugiés se construisent dans la grotte, des structures en bois, qu'ils nomment baraques, comportant des planchers volants reposant sur des poutres ancrées dans les murailles. On voit, encore aujourd'hui, les nombreuses encoches de fixation creusées dans les parois.

 

Des cloisons séparaient les familles, chacune disposant sans doute d'une pièce commune au sol et d'une chambre à l'étage. On pense également que les plus riches sont installés près des entrées, les autres vivant moins confortablement dans les galeries profondes.

 

 

L'assaut français contre la grotte (juillet 1637)

 

 

 

En juillet 1637, quittant Lons-le-Saunier et se dirigeant vers Orgelet, les troupes du Duc de Longueville passent à proximité de la grotte et lui donnent l'assaut en la canonnant.
D'après E. Monot, le curé Conduit a noté sur son missel que l'assaut a duré 6 heures et que 80 Français ont été blessés. Le Manifeste d'Antoine Brun (1638), publié par E. Longin (Vesoul, 1905, p.24) indique, quant à lui, que les Français repoussés ont laissé "mémorables dépouilles" aux mains des défenseurs de la grotte.

 

C'est lors de ce combat que la tradition locale place l'épisode du Miracle des Abeilles: un essaim d'abeilles sortant de la grotte aurait mis les Français en déroute. Nous pensons que cet épisode est probablement imaginaire ou pour le moins grandement enjolivé par trois siècles de récits.

 

 

 

Lacuson

 

 

 

LacusonClaude Prost, dit Lacuson (1607-1681), Jurassien fidèle à la couronne d'Espagne, combattit les Français avec ses troupes durant toute la Guerre de Dix Ans. La Baume de Revigny figure dans son épopée.
En mars et avril 1640, après la prise du château de Publy et le ravage des campagnes par les armées françaises, les populations réfugiées dans la Baume de Revigny souhaitent obtenir l'aide de Lacuson.
Le curé Simon Conduit, encore lui, écrit de la grotte une lettre datée du 16 avril 1640, adressée à César du Saix, baron d'Arnans, sous les ordres de qui Lacuson servait.
Cette lettre, d'après Rousset, informait d'Arnans que trois garnisons françaises se tenaient aux environs de la grotte (Publy, Saint-Maur et Revigny), et envisageaient de l'attaquer.
Le curé demande de l'aide : "Et combien que les François ne puissent ébranler notre constance, néanmoins, pour retondre leurs rodomontades gigantines et empêcher leurs fréquentes courses, mes paroissiens de Revigny vous supplient avec moi les vouloir obliger d'un escadre de vos soldats de 25 hommes, qu'ils desireraient affectionnément être conduits par le sieur PetitLorrain, et s'il vous plaisoit leur donner ordre pour faire contribuer le ressort d'aval à leur nourriture par tous les villages qui contribuent à nos ennemis, car ils esperoient qu'ayant une garnison vous en entendriez de généreux exploits." 

 

On ne sait si la lettre eut l'effet escompté, mais il est établi que Lacuson s'est rendu plusieurs fois à la Baume de Revigny dans les jours qui suivirent, les 22 et 23 avril (voir références citées par L. Lautrey, 1911).